La bâtonnière de Paris en garde a vue

PAR Guillaume Martine

par Guillaume Martine
Membre du Conseil de l’Ordre de Paris, SAF Paris

Le 30 mai au matin, la bâtonnière et le vice-bâtonnier de Paris, accompagnés d’une dizaine de délégués, ont visité simultanément, et de manière inopinée, 4 commissariats parisiens : Ve, XVIe, et XVIIIe (Goutte d’or, Évangile).

Ces derniers n’avaient pas été choisis par hasard, mais faisaient partie de ceux régulièrement signalés par des confrères qui constataient, à l’occasion d’interventions en garde à vue, les conditions pour le moins difficiles faites aux personnes gardées à vue.

Cellule de garde à vue dans un comissariat parisienDes gardés à vue entassés
Les conditions matérielles dans lesquelles se déroulent la privation de liberté, et plus particulièrement l’encellulement sont inacceptables. Alors que les normes internationales fixent la superficie minimale d’une cellule individuelle à 7 m2, la quasi-totalité des cellules individuelles, dans les deux commissariats qui en disposent, sont d’une superficie nettement moindre. Deux autres commissariats (XVIe et Évangile) ne disposent tout simplement pas de cellules individuelles. S’agissant des cellules collectives, sur les 12 cellules visitées, une seule respecte les normes internationales qui fixent la superficie minimale à 12 m2. Ainsi, dans le commissariat du XVIe arrondissement, des cellules de seulement 4,3 m2 sont censées accueillir jusqu’à 10 personnes simultanément. À la Goutte d’or, les 8 personnes qui s’entassent dans une cellule de 9,2 m2 sont tellement serrées qu’on peine au départ à les dénombrer sous des couvertures qu’elles sont contraintes de partager.

L’hygiène, quand on peut…
À la très grande promiscuité s’ajoute l’absence, parfois de matelas, parfois de couvertures. Lorsque des couvertures sont néanmoins fournies, elles ne sont pas à usage unique. Dans certains commissariats, on peine à nous indiquer à quel rythme elles sont nettoyées. Quant à l’hygiène des locaux : s’ils sont parfois en bon état car lavés quotidiennement (Ve, XVIe), ceux de la Goutte d’or se trouvent dans un état de saleté avancé, en particulier le local de fouille que l’on peut volontiers qualifier de dépotoir. Enfin, si le jour des visites les températures étaient clémentes, on imagine aisément les conséquences insupportables des différents pics de chaleur ces derniers mois.

Si l’état des cellules est quasi systématiquement déplorable, les conditions de déroulement de la garde à vue sont quant à elles plus variables : les auditions se déroulent parfois dans une salle collective en même temps que d’autres, mais le plus souvent dans des salles individuelles ; les droits, en plus d’être formellement notifiés, sont dans la majorité des cas affichés, et parfois en plusieurs langues ; le local d’examen médical est parfois bien entretenu, mais dans certains cas il n’y a pas de table d’examen (XVIe)…

D’autres visites à venir
À l’issue de ces 4 visites, un pré-rapport global a été publié, reprenant les différents constats dressés lors de ces visites, et pointant les sujets sur lesquels des améliorations, parfois significatives, nous semblaient indispensables. Ce rapport a été adressé à différentes autorités (Procureur, Préfet de police…) afin de recueillir leurs observations. De nouvelles visites dans ces mêmes commissariats se dérouleront dans les prochains mois, afin de permettre un suivi dans la mise en œuvre, ou non, des recommandations formulées dans le pré-rapport. Enfin, d’autres visites inopinées sont également en cours de préparation afin de couvrir tout le panel de lieux de détention à Paris.

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