Cette année le SAF fête ses 50 ans. Certain.e.s comme moi, fêtent leurs moins de dix années d’exercice, sept dans mon cas. Adhérente et active au SAF depuis seulement quelques années, je ne saurais témoigner avec la hauteur de nos aîné.e.s de ce que représentait et représente aujourd’hui notre syndicat. Modestement donc, c’est mon petit point de vue, nécessairement personnel et récent, que je suis néanmoins ravie de livrer ici.
Aujourd’hui, les conditions d’exercice de la profession d’avocat.e sont extrêmement dures, on le dit suffisamment. Nous subissons l’isolement, la pression économique, la pression psychique, l’exploitation galopante des collaboratrices et collaborateurs, l’exclusion des palais, les liens tendus avec les magistrats, avec les justiciables, le foisonnement effréné des règles et textes, la réduction toujours plus drastique des budgets consacrés à l’accès au droit, à l’AJ, et, de façon générale, nous supportons l’épuisement et le découragement face à tous ces phénomènes conjugués.
À la lecture des écrits de nos aînées Régine et Simone, il semble malheureusement que rien n’ait bien changé depuis les années 70. La Justice est toujours en crise, les prisons étaient et sont toujours surpeuplées, le traitement réservé aux femmes, aux personnes stigmatisées/racisées/exclues n’a pas cessé, les attaques contre notre profession s’aggravent. Les formes ont évolué, le fond demeure.
Si des victoires sont arrachées, il nous revient sans cesse de remettre l’ouvrage sur le métier.
Mais paradoxalement, pour nous « Safistes », il peut s’agir en réalité d’un motif de réjouissance majeur.
Parce que le SAF a toujours œuvré dans ce marasme inextricable et permanent, il est aussi éternel que les difficultés de la Justice, des justiciables et de leurs avocat.es. pour peu que nous le fassions vivre à travers nos liens et nos révoltes.
Parce que le SAF a toujours permis à celles et ceux qui en ont la volonté, la force et l’envie, de combattre ensemble, il constitue une planche de salut et une source nouvelle de sens donné au port de notre robe.
Parce que le SAF mutualise les luttes, les intelligences,
les expériences, les verres de vin et très vite les ami.es,
les moments suspendus comme ceux qui trempent nos robes,
les échecs et les peurs, des joies, les coups de gueule
comme les coups de main, il constitue un formidable chaudron
dont sortent des effluves toujours vivifiantes.
Le SAF est un pont jeté entre nous. Entre nos anciennes et nos nouvelles générations, une forme de famille dont nous ne savions pas que nous étions orphelin.es, une mémoire collective sans cesse mise à jour. En manière de clef de voûte, y compris dans les désaccords et les discussions qui nous animent si souvent.
Adhérer au SAF en 2024 c’est faire partie d’un collectif protéiforme qui se nourrit de son histoire, la pétrit, et dont le perpétuel et joyeux mouvement agrège les qualités de chacun.e pour faire advenir un futur meilleur, qui nous ressemble.
Nous sommes finalement remis.es à ce constat : le SAF est une immense source de joie qu’il nous appartient de perpétuer. J’en suis, vous aussi et, sans verser dans l’angélisme, j’ai la conviction que c’est extraordinaire et précieux. Les combats continuent, on est là !