PUBLIÉ LE 7 mai 2014

Le SAF s’inquiète du contenu de l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 22 mars 2014 relatif à l’indemnisation du chômage en ce qu’il porte des régressions pour les droits des salariés privés d’emploi. Le SAF s’alarme tout particulièrement de l’article 6 de cet accord relatif au différé d’indemnisation, qui, hors licenciements pour motif économique, porte le différé d’indemnisation de 75 jours à 180 jours, soit l’équivalent de six mois.

Présenté à tort comme une disposition concernant une minorité de cadres les mieux payés, ce nouveau délai a en réalité vocation à s’appliquer à tous les salariés, dès lors qu’ils perçoivent des indemnités de rupture au-delà du minimum légal, ce qui est très fréquemment le cas.

Or, Pôle Emploi fait notamment entrer dans le décompte des indemnités de rupture servant de base au calcul du différé, et ce de manière rétroactive, les dommages et intérêts obtenus par les salariés lorsqu’ils contestent leur licenciement devant la juridiction prud’homale. Ainsi, un salarié licencié qui aura gain de cause dans le cadre d’un procès prud’homal ou qui obtiendra une indemnisation transactionnelle pourra se voir réclamer jusqu’à six mois de remboursement d’allocations chômage, sachant que ce maximum de six mois sera atteint dès l’obtention de 16 200 € de dommages et intérêts.

Ce nouveau différé d’indemnisation par Pôle Emploi aura pour effet de dissuader les salariés de faire usage de ce qui est un droit essentiel : saisir le Conseil de Prud’hommes lorsqu’ils ont fait l’objet d’un licenciement injustifié. Pourquoi en effet s’infliger une procédure longue et les frais d’une défense souvent nécessaire, dès lors que les sommes obtenues au final en réparation du préjudice du salarié seront en grande partie récupérées par Pôle Emploi ?

Il s’agit là d’un grave détournement de l’objet de ces sommes, qui est d’indemniser le préjudice moral, professionnel et financier subi par le salarié du fait de la perte injustifiée de son emploi. Ces sommes n‘ont pas à être confondues avec un revenu de substitution.

Pour le SAF, ce différé d’indemnisation génère une double atteinte aux droits des salariés : au droit d’accès au juge d’une part, et au droit d’obtenir la réparation intégrale de son préjudice d’autre part.

En outre, le Code du travail prévoit explicitement, en son article L. 1235-4, les conditions dans lesquelles Pôle Emploi peut être indemnisé à la suite d’un litige prud’homal,  en demandant à l’employeur fautif, condamné – et non au salarié – de rembourser  jusqu’à six mois d’indemnités de chômage. Le SAF déplore que Pôle Emploi n’utilise que très rarement cette faculté légale qui pourtant fait logiquement peser sur l’employeur la charge d’un licenciement abusif et représente une source de financement potentiellement importante pour le service public de l’emploi.

 Le SAF alerte donc sur ces dispositions de l’ANI du 22 mars 2014 qui viennent faire peser sur le salarié le remboursement de ces six mois d’indemnité.

 Rappelant que le droit à un recours effectif est une liberté fondamentale, le SAF en appelle aux partenaires sociaux et au Ministre du travail afin que soient exclues des assiettes de calcul des droits à l’allocation chômage toutes les sommes à caractère indemnitaire qui doivent rester acquises au salarié.

 Le SAF rappelle enfin qu’il est primordial de distinguer l’indemnité servie par Pôle Emploi de l’indemnisation octroyée par un juge pour réparer un préjudice. Pôle Emploi ne saurait faire l’amalgame.

Paris, le 6 mai 2014

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