PUBLIÉ LE 13 février 2019
  1. Le plafonnement des indemnités prud’homales : la lutte continue, affutons nos armes

De nombreuses décisions rendues par des Conseils de prud’hommes montrent la pertinence de l’argumentaire diffusé par le SAF au mois de février 2018 au sujet de l’inconventionnalité du plafonnement des indemnités pour licenciement injustifié.

Rappelons que ces décisions émanent d’une juridiction paritaire et que certaines d’entre elles ont été prises sous présidence employeur. A Agen, c’est le juge départiteur, magistrat professionnel, qui a décidé d’écarter le plafond au motif de son inconventionnalité.

Le Comité Européen des Droits sociaux, qui a estimé en 2016 que la Loi Finlandaise était non conforme à l’article 24 de la Charte sociale européenne alors qu’elle prévoyait un plafond similaire mais pourtant plus favorable que le plafond français, a été saisi de réclamations collectives à l’encontre du plafond prévu par l’article L.1235-3 du Code du travail, par deux organisations syndicales, FO et CGT.

Le SAF a décidé de produire des observations à l’appui de ces réclamations.

Devant les juges français, les employeurs et leurs avocats tentent d’apporter la contradiction et d’allumer des contre-feux pour échapper à l’inconventionnalité de la réforme.

C’est pourquoi le SAF diffuse aujourd’hui une mise à jour de son argumentaire (voir ci-dessous).

Le SAF souhaite en effet que tous, avocats de salariés, défenseurs syndicaux et salariés qui se défendraient seuls, puissent s’emparer de cet argumentaire au soutien de leur demande visant à écarter le plafond pour obtenir une réparation adéquate du préjudice résultant d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le SAF maintient par ailleurs que le Gouvernement devrait purement et simplement retirer le texte introduit par l’ordonnance le 22 septembre 2017, comme il avait retiré en 2008 le texte qui avait créé le Contrat Nouvelle Embauche (CNE) jugé non conforme à la Convention n°158 de l’OIT.

Mais à ce stade, la volonté gouvernementale semble plutôt de continuer à réduire les droits des justiciables et de réduire les moyens des juridictions.

Ainsi, non content de priver les salariés licenciés de manière injustifiée d’un recours utile et de priver les juges de leur pouvoir d’appréciation pour fixer le montant de la réparation de leur préjudice, le Gouvernement vient réduire une fois de plus les moyens alloués aux Conseils de prud’hommes et rendre plus difficile la communication avec eux, en fusionnant leurs greffes avec ceux des Tribunaux de Grande Instance (TGI).

 

  1. Le bonneteau des greffiers, ou comment avec le projet de Réforme de la Justice, on perd à tous les coups !

Voté de nuit en décembre dernier, dans le cadre du projet de loi de programmation et de réforme pour la justice, un amendement du Ministère de la justice ajoute à la fusion déjà très contestée des tribunaux d’instance au sein du TGI, qui devient le Tribunal judiciaire, une fusion des Greffes des juridictions civiles incluant aussi celui du conseil des prud’hommes.

L’article 53 prévoit ainsi que lorsqu’un conseil des prud’hommes a son siège dans la même commune que le siège d’un tribunal judiciaire ou de l’une de ses chambres de proximité, le greffe du tribunal judiciaire assure les fonctions de greffe du conseil des prud’hommes.

Aucune réflexion, aucune concertation ni avec les greffiers, ni avec les conseillers, ni avec les usagers et encore moins avec les avocats n’a précédé le vote d’une telle disposition totalement contre-productive.

Au soutien de cet amendement issu de la Majorité, on trouve encore et toujours un discours mensonger qui prétend assurer ainsi, dans le plus pur style de la novlangue actuelle, « une allocation optimale des moyens sur un même territoire ».

C’est en réalité la mise en place sournoise de l’interchangeabilité des agents du greffe qui devront ainsi courir du tribunal judiciaire au conseil des prud’hommes et vice versa au gré d’un sous-effectif permanent organisé au plus haut niveau. On comprend aussi que la cible est double :

  • D’une part, bêtement « déshabiller Paul pour habiller Jacques » puisqu’une telle fusion permettra de faire obstacle à toute création de poste,
  • D’autre part dégrader encore le fonctionnement des Conseil de Prud’hommes en les privant de greffiers « ressources » sachant que la juridiction est composée de juges non professionnels qui ont par nature besoin d’un greffe solide, compétent et stable.

 

La Loi Macron du 6 août 2015 a déjà compliqué la procédure de saisine du conseil des prud’hommes, réduisant ainsi le recours en justice de l’ordre de 30 à 40%. Deux ans plus tard, les Ordonnances Macron sont venues réduire encore les délais de prescription, diviser par deux toutes les indemnités plancher, et plafonner les dommages et intérêts des salariés licenciés sans motif valable. La déconstruction du pilier démocratique de la Justice prud’homale se poursuit, encore et encore, en continuant à bloquer l’accès au juge et le fonctionnement des Conseils des prud’hommes.

On sait le malaise des salariés qui vivent dans les entreprises sans bureau fixe… Comment vont vivre à l’avenir les greffiers sans greffe fixe, baladés d’un lieu à un autre sans considération pour leur expertise ni respect pour leur travail ?

On sait aussi à quel point l’intégration des personnels des TASS et des TCI au sein du Ministère de la Justice s’est faite dans la douleur et le mépris et ce, sans aucune plus-value pour le justiciable.

Et si les greffiers devaient finalement être affectés uniquement dans les locaux du TGI, parfois éloignés du Conseil de prud’hommes, y compris lorsqu’il s’agit de la même commune, comment pourront-ils répondre aux besoins des justiciables, des avocats et des conseillers prud’hommes eux-mêmes ?

Une telle fusion, loin d’apporter « l’allocation optimale » attendue ajoutera de la souffrance pour les personnels et dégradera plus encore le service public.

Cette réforme, c’est le bonneteau, on perd à tous les coups même si on a bien regardé les cartes…

Une raison qui s’ajouter aux autres (cf. communiqués précédents, notamment http ://lesaf.org/greve-generale-le-5-fevrier-2019/) pour continuer la mobilisation contre le Projet de Loi Justice.

Contact presse : Judith KRIVINE, Responsable de la commission sociale du SAF

jk@dellien.com / 06 82 00 88 37

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