Aujourd’hui, alors que les fondements mêmes de notre droit sont ouvertement ou implicitement remis en cause par des responsables politiques, l’indépendance de la justice est niée, questionnée, contestée. Les juges sont naturellement les premières cibles, mais les avocats ne sont pas en reste. Le principe même de la Défense, l’indépendance de notre fonction et la probité de la profession subissent de plus en plus d’attaques. Mais cette fois, le discrédit est jeté par des magistrats, comme en témoigne la situation à la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, où les juges en charge du contrôle de la rétention administrative des étrangers n’hésitent plus à affirmer, assez explicitement, que la parole des avocats ne vaut pas grand-chose. Des audiences se tiennent depuis l’automne 2024 en visio pour des étrangers placés au centre de rétention (CRA) de Nice. Le CRA et la salle de visio se situent dans une caserne de police. Les personnes retenues sont extraites du CRA pour être conduites dans un simple bureau, au cœur même du commissariat de police, entourés de policiers. Cette scène est manifestement illégale, contrevenant à de nombreux principes dégagés notamment par le Conseil constitutionnel, le Conseil d’État et la Cour de cassation. Des confrères et consœurs soulèvent
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À Aix, on juge sans (vraiment) voir. Et surtout sans croire les avocats
Environnement/Santé
A69 : LE DROIT DE L'ENVIRONNEMENT MIS A MAL PAR L'ARRET DE LA COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE TOULOUSE FAVORABLE À LA REPRISE DES TRAVAUX
Le SAF exprime sa profonde inquiétude suite à l’arrêt rendu ce jour par la cour administrative d’appel de Toulouse concernant le projet d’autoroute A69 Toulouse-Castres. Moins de trois mois après la décision historique du tribunal administratif de Toulouse qui avait annulé les autorisations environnementales, cette décision permet la reprise des travaux en prononçant un sursis à exécution du jugement du 27 février 2025, portant un coup sévère au droit de l’environnement. En suivant de telles logiques, la justice administrative entérine la stratégie du fait accompli déployée par les porteurs des projets, comme cela devient la pratique régulière d’ores et déjà constatée par le passé sur les grands projets d’infrastructures. Ces politiques du fait accompli confirment les craintes exprimées par les avocats et avocates depuis plusieurs mois : les magistrats sont soumis à des pressions considérables pour privilégier les intérêts économiques immédiats au détriment de la protection du vivant. L’image de la justice est gravement ternie par ces stratégies du fait accompli. Pour l’A69, l’image de la justice est particulièrement ternie par les revirements successifs et à très brève période, observés dans ce dossier. Après l’annulation courageuse en février 2025, l’arrêt de ce jour permettant la reprise des travaux donnent le sentiment
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Tout casser pour des queues de cerise. En voilà un programme !
Un big bang ! C’est ainsi que le Monde décrit les propositions de réforme, parfois anecdotiques, parfois contraires à notre tradition juridique depuis la Révolution, contenues dans une lettre adressée à l’ensemble de la magistrature et du personnel des services judiciaires par le Garde des sceaux en début de semaine. S’il se prévaut d’une soi-disant écoute attentive des difficultés de l’institution judiciaire pour proposer de prétendus remèdes, il tente en réalité de les convaincre que la seule logique qui les sauverait serait celle de la gestion des stocks et de la sanction. Pourtant, toutes les personnes qui pratiquent les métiers du droit sont guidées par la volonté de participer à un sentiment de justice. Toutes veulent pouvoir dire qu’elle est rendue au nom du peuple. Alors, certes ! le sentiment de justice exige de l’efficacité, mais personne ne se satisfait d’une justice toujours plus expéditive, excessive et hâtée, déshumanisée voire désincarnée. Car c’est bien ce que le Garde des sceaux propose. En matière pénale : des seuils d’emprisonnement minimaux et donc des peines automatiques, sans considération pour la complexité de l’individu et entraînant mécaniquement plus d’incarcérations ; des peines négociées pour les infractions les plus graves comme les viols ; voilà des mécanismes qui ressemblent à s’y méprendre
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État de droit – indépendance de la justice : un état des lieux
Table ronde sur l’Etat de droit le 17 avril 2025 de 18h à 20h30, au siège de la LDH et en visioconférence (sur inscription) Pour analyser et défendre l’Etat de droit et l’indépendance de la justice, seront présent-e-s : Judith Krivine, présidente du Syndicat des avocats de France (SAF), interviendra sur l’indispensable séparation des pouvoirs ainsi que les attaques à l’encontre des avocat-es ; Nathalie Tehio, présidente de la LDH (Ligue des droits de l’Homme), insistera sur la nécessité, au-delà de sa défense, d’approfondir l’Etat de droit, particulièrement l’indépendance de la justice ; Tchérina Jérolon, responsable du programme Conflits, migrations et justice à Amnesty International – France, reviendra sur les attaques à l’encontre de la CPI et la CIJ ; Céline Roux, adjointe de la Défenseure des droits en charge de la déontologie des professions de sécurité, s’interrogera sur les mécanismes d’évitement du juge, pourtant garant des libertés, par exemple par la procédure d’amende forfaitaire ; Alexandrina Najmowicz, secrétaire générale du Forum civique européen, parlera de l’approche de l’Etat de droit par les institutions européennes et, dans ce cadre, de leur réaction aux attaques contre l’indépendance des institutions judiciaires dans les Etats membres ; Thomas Giraud, président du Syndicat Justice administrative collective et indépendante
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Appel de la société civile pour la défense de l’État de droit
Le 31 mars, à l’issue de longues années de procédure et d’un débat judiciaire contradictoire, le Rassemblement national ainsi que des élus et des cadres du mouvement d’extrême droite ont été condamnés pour détournements de fonds publics. Marine Le Pen, qui était présidente du parti et parlementaire européenne au moment des faits, est la personne la plus lourdement condamnée : 5 ans d’inéligibilité avec exécution provisoire et 4 ans de prison, dont 2 avec sursis. Depuis l’annonce de ce verdict qui découle de la seule application de la loi par des juges indépendants, le Rassemblement national a choisi de dénoncer la décision de justice en des termes aussi abusifs que choquants. Il a accrédité l’idée d’un « complot » mené par un « gouvernement des juges », s’attirant ainsi les soutiens enthousiastes des figures mondiales de l’extrême droite que sont Trump, Musk, Bolsonaro, Poutine, Orban ou Salvini. Encore plus inquiétant, ces critiques d’une décision de justice ont été plus largement relayées par des élus et responsables politiques d’autres partis, y compris le Premier ministre, et par un grand nombre de médias peu soucieux de la réalité des faits. Ces sorties ont immédiatement entraîné des menaces à l’endroit des magistrats qui ont rendu leur jugement collégialement.