PUBLIÉ LE 1 septembre 2025

Cinq ans après le décès notre consœur Ebru Timtik le 27 août 2025 qui aura payé de sa vie après une grève de la faim de 238 jours sa quête inlassable pour le droit à un procès équitable en Turquie, des dizaines d’avocats membres du Progressive Lawyers Association (ÇHD) et du People’s Law Office (HHB) sont toujours poursuivis, voire définitivement condamnés et emprisonnés en Turquie, sur la base d’accusations infondées et de procédures manifestement inéquitables.

Plusieurs missions d’observation internationales ont documenté des violations graves et systématiques des droits fondamentaux, caractérisées par l’absence d’indépendance et d’impartialité des tribunaux, des arrestations et ré-arrestations illégales, des détentions arbitraires, un recours abusif à des témoins anonymes et repentis, sous pression policière, ainsi que des entraves constantes aux droits de la défense, à l’égalité des armes et à la publicité des débats.

Différentes missions d’enquête ont confirmé ces observations : juges et procureurs agissant sous pression politique, déni du droit à la défense, recours à des témoins anonymes et sanctions infligées à des avocats uniquement pour avoir exercé leurs fonctions professionnelles.

Le SAF renouvèle toujours sa profonde solidarité à l’égard des consœurs et confrères turcs injustement poursuivis et détenus, en participant à des missions d’observations de procès concernant notamment les membres du Progressive Lawyers Association (ÇHD) et du People’s Law Office (HHB) et plus récemment le Bâtonnier d’Istanbul Ibrahim Kaboğlu qui après avoir été destitué d’office le 21 mars 2025, est désormais pénalement poursuivis avec les membres de son Conseil de l’Ordre pour prétendues « diffusion publique de fausses informations » et « propagande terroriste ».

Cet été, nous avons renouvelé notre entier soutien nos consœurs et confrères Aycan Çiçek, Selçuk Kozağaçlı, Barkın Timtik, Oya Aslan, Behiç Aşçı, Özgür Yılmaz et Aytaç Ünsal en allant les rencontrer respectivement dans les prisons de Kandira, Silivri, Tekirdğa et Edirne.

Cette situation de graves violations des droits fondamentaux, signalée également dans des rapports des organes des Nations unies et des principales ONG internationales, met en évidence une érosion systématique de l’État de droit en Turquie.

Malgré ces constats répétés et largement documentés, la Cour européenne des droits de l’homme tarde à rendre des décisions sur des requêtes pendantes depuis des années.

Depuis le dépôt auprès de la Cour, en avril 2021, de requêtes concernant ces procès collectifs d’avocates et avocats, le processus de communication – première étape cruciale au cours de laquelle le gouvernement turc est officiellement tenu de répondre aux allégations – n’a toujours pas été engagé dans de nombreuses affaires.

Pour rappel, la requête initiale, datée du 29 avril 2021 comprend des plaintes relatives à la détention provisoire et les requêtes déposées le 15 mars 2023 concernent le droit à un procès équitable.

Ce retard de plusieurs années est injustifiable et va à l’encontre des principes établis par la Cour elle-même concernant l’impératif d’une justice rapide, en particulier lorsque les droits fondamentaux sont immédiatement menacés.

Cette inaction alimente l’impunité et affaiblit encore davantage la protection des droits fondamentaux des avocats.

En lien avec l’AED (Avocats européens démocrates), le SAF participera le vendredi 12 septembre 2025 à 10h à une conférence de presse au Barreau de Strasbourg afin de dénoncer l’inaction de la Cour européenne des droits de l’homme dans les affaires concernant des avocats turques et kurdes.

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