PUBLIÉ LE 20 novembre 2019

Madame la Ministre,

Pourquoi ne pas faire preuve de transparence ?

Le projet de créer une  procédure de filtrage des pourvois en cassation destinée à en réduire le nombre, confié à la commission Nallet, qui vient d’être abandonné, avait également pour objectif d’établir un bilan de la réforme de l’appel civil.

Dans cette perspective, le 7 février 2019, vous avez saisi l’Inspection générale de la justice pour lui demander d’évaluer si les objectifs d’amélioration de la qualité et de la célérité de la justice justifiant les différentes réformes de la procédure d’appel depuis 2011 étaient atteints notamment s’agissant de réduire les stocks et les délais.

Madame Chantal Acquaviva a ainsi été missionnée pour établir un rapport en trois mois.

Faute de temps, seuls les magistrats, les greffiers et le Conseil National des Barreaux ont été auditionnés.

Il a été néanmoins suggéré que le Syndicat des avocats de France adresse ses observations, proposition à laquelle nous avons bien entendu répondu favorablement.

Nous avons dressé un état des lieux qui démontre :

  • Qu’en dépit d’un volume d’appels relativement constant, les délais de jugement ont continué d’augmenter de façon continue entre 2010 à 2017, sans aucune amélioration en 2011 (entrée en vigueur du Décret Magendie), ni en 2016 (extension en matière prud’homale) ni en 2017 (Durcissement du Décret Magendie) ;
  • Une explosion des sinistres déclarés par les avocats, et par conséquent autant de justiciables privés de la possibilité de se défendre ou du droit de contester une décision de justice devant une nouvelle juridiction, principes pourtant essentiels d’une procédure judiciaire équitable ;
  • Un accroissement du travail des magistrats, se traduisant par des spécialisations de Chambres se consacrant exclusivement à la mise en état au détriment du règlement des litiges.

Ce constat s’accompagnait de multiples propositions, certaines supposant une refonte d’ensemble de la procédure d’appel, d’autres pointant des insuffisances du texte ou des erreurs de rédaction qui suscitent un contentieux parfaitement inutile. A toutes fins utiles, nous vous en adressons une copie.

Au terme de sa mission, Madame Acquaviva vous a remis son rapport le 24 juillet 2019.

Logiquement, nous l’avons réclamé, il nous a été répondu qu’il fallait attendre le rapport Nallet.

Celui-ci vous a été remis le 30 septembre 2019, cependant, nous n’avons toujours pas obtenu communication du rapport Acquaviva.

Lors de notre Congrès le 8 novembre 2019, nous souhaitions vous interroger à ce sujet mais malheureusement vous ne pouvez-vous rendre disponible (mais restiez attentive à nos travaux).

Nous avons dès lors questionné votre représentant, le Directeur des affaires civiles et du Sceau, M. De Mongolfier, sa réponse est très claire : la décision de rendre public le rapport Acquaviva vous appartient.

Quatre mois après la remise du rapport, nous ne comprenons pas votre réticence à nous le communiquer, raison pour laquelle nous sommes contraints de vous adresser la présente lettre ouverte.

Pourquoi ne pas faire preuve de transparence ? Avez-vous peur de rendre public l’absence de toute amélioration des délais de jugement ? L’accroissement inutile de la charge de travail des magistrats et greffiers ? L’explosion des caducités et irrecevabilités au préjudice des justiciables ? La multiplication des sinistres déclarés par les avocats, au détriment d’une réponse judiciaire ?

Cette publication permettrait pourtant d’éclairer le rapport Nallet dont les réflexions sur la procédure d’appel se limitent à affirmer que « le groupe de travail considère que certaines notifications ou certains délais, dont l’utilité est discutable, pourraient être supprimés ».

En outre, il nous semble que la correction et le respect qui a vocation à régir nos échanges implique que nous soit transmis le résultat d’un travail auquel il nous a été demandé de contribuer.

C’est pourquoi nous vous demandons expressément  de rendre public ce rapport, et compte tenu de l’attachement de tous au respect de l’accès à la justice, lequel suppose un véritable droit d’appel, vous comprendrez que nous rendions public ce courrier.

Dans cette attente, veuillez recevoir, Madame la Ministre, nos salutations distinguées.

PJ : observations du SAF sur la  réforme de la procédure d’appel

 

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