La très médiatique loi dite « narcotrafic » a fait l’objet d’une censure partielle par le Conseil constitutionnel en raison de ses multiples violations des libertés fondamentales. Celui-ci a notamment constaté que des violations du principe du contradictoire, des droits de la défense et du droit à la vie privée émaillaient la loi votée.
Par conséquent, le Conseil constitutionnel a entre autre censuré :
- L’usage d’un dossier-coffre inaccessible à la défense en ce qu’il prévoyait la possibilité à titre exceptionnel de condamner une personne sur la base d’éléments recueillis au moyen d’une technique d’enquête dont certaines informations auraient été versées au dossier coffre ;
- Le recours systématisé à la vidéoconférence pour les détenus placés au sein des quartiers de lutte contre la criminalité organisée
- L’usage de boîtes noires (surveillance algorithmique) en matière de criminalité organisée
- L’accès généralisé aux bases de données fiscales par les services de renseignement
S’il n’a par ailleurs admis que sous un certain nombre de réserves d’interprétation les expulsions locatives, les fermetures administratives et l’activation des téléphones portables à distance par les forces de l’ordre, ces dispositions ont été jugées conformes aux exigences constitutionnelles.
La Ligue des droits de l’homme, le Syndicat des avocats de France et le Syndicat de la magistrature rappellent que le Conseil constitutionnel ne constitue pas un organe de tri des initiatives du gouvernement attentatoires aux libertés fondamentales et qu’il est particulièrement inquiétant que de telles propositions aient pu même être formulées.
Au-delà, et si de telles censures et réserves sont à saluer, nos organisations avaient également alerté le Conseil constitutionnel sur un ensemble d’autres violations. Nous déplorons notamment que soient admis au sein de notre droit la re-création des quartiers de haute sécurité, attentatoires à la dignité humaine et contraires à l’objectif de réinsertion, l’expulsion des populations les plus précaires de leurs logements ou encore la fermeture de commerces pourtant exempts de toute infraction qui pourrait leur être reprochée.
Rappelons qu’il n’entre pas dans la compétence du Conseil constitutionnel de se prononcer sur la politique menée en matière de stupéfiants. Ainsi, la pénalisation de la simple consommation, que nos organisations combattent au sein du CNPD (en note : collectif pour une nouvelle politique des drogues) n’est pas remise en cause, en dépit des demandes en ce sens de l’ONU et des exemples positifs du Portugal ou du Québec.
De plus, il est fait le choix de restreindre toujours davantage les droits et libertés de tout un chacun, sans aucune garantie d’efficacité, à l’heure où la réforme de la police judiciaire a abouti à priver les juges spécialisés en criminalité organisée de policiers formés et compétents, et alors que l’Ofast (en note : office anti-stupéfiants) ne dispose toujours pas des moyens nécessaires pour lutter contre le « haut du spectre », comme l’’a pointé la Cour des comptes.
Retrouvez ici la contribution extérieure commune transmise au Conseil constitutionnel.