Depuis 2010, la Journée internationale de l’avocat·e en danger est célébrée chaque année le 24 janvier. Elle est organisée par la Coalition pour la Journée internationale de l’avocat·e en danger, un réseau mondial d’organisations juridiques nationales et internationales et d’associations d’avocat·es. Cette journée vise à attirer l’attention sur les difficultés rencontrées par les avocat·es dans l’exercice de leur profession dans un pays donné chaque année, et à inciter les responsables gouvernementaux, les institutions internationales, la société civile, les médias et le public à prendre des mesures.
En 2025, la Journée internationale de l’avocat·e en danger met en lumière la persécution des avocat·es au Belarus, qui font l’objet d’un harcèlement systématique et d’interférences dans leurs activités professionnelles. À la suite de l’élection présidentielle et des manifestations de masse de 2020, le gouvernement a pris des mesures de répression à l’encontre des avocat·es, des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes et des dissident·es. Le présent rapport fait état d’une tendance persistante et inquiétante au Belarus, où la profession est confrontée à des sanctions pénales de plus en plus lourdes, à des détentions arbitraires et à une ingérence systémique dans leurs activités professionnelles.
Des lois imprécises et faisant l’objet d’une interprétation extensive en matière de sécurité nationale sont utilisées pour réduire au silence les personnes qui critiquent le gouvernement et celles qui défendent l’État de droit. Des milliers de personnes ont fait l’objet d’arrestations, de détentions et de poursuites arbitraires et ont été condamnées à de lourdes peines de prison à l’issue de procès inéquitables. Des rapports font également état d’actes de torture et d’autres mauvais traitements généralisés, ainsi que d’actes de torture et d’autres mauvais traitements ainsi que de cas de disparitions forcées.
Les changements constitutionnels et législatifs ont encore conduit à l’érosion de l’indépendance du pouvoir judiciaire et des instances professionnelles. Ces modifications ont renforcé le contrôle de l’exécutif sur le pouvoir judiciaire et la profession juridique. Ce faisant, le principe fondamental de la séparation des pouvoirs disparu.
Le ministère de la justice exerce une influence considérable sur la réglementation de la profession d’avocat·e. L’Association républicaine du Barreau du Belarus et les barreaux territoriaux est dépourvue de toute indépendance et, au lieu de protéger et de soutenir leurs membres, ces institutions sont utilisés par le ministère de la Justice pour réprimer les avocat·es qui travaillent dans le domaine des droits de l’homme et d’autres affaires politiquement sensibles. Des avocat·es ont été harcelé·es, arrêté·es et détenu·es, et ont fait l’objet de mesures disciplinaires, simplement pour avoir exercé leur métier. Outre l’impact sur les droits individuels des consœurs et confrères, ces mesures ont un effet dissuasif sur l’accès à la justice et l’État de droit pour la population du Belarus.
Les actions de l’État biélorusse contreviennent à la fois aux lois nationales et aux normes internationales. Il s’agit notamment de l’utilisation abusive des normes éthiques et déontologiques pour sanctionner les avocat·es dans le cadre de leurs expressions professionnelles et publiques, étouffer la dissidence et freiner la défense des intérêts légitimes. La procédure de retrait de la licence d’un·e avocat·e au Belarus manque notablement de transparence, de représentation et d’impartialité. La nature arbitraire de ces procédures disciplinaires porte atteinte à l’indépendance de la profession juridique et favorise un environnement dans lequel les avocat·es sont contraint·es de travailler sous la menace constante de perdre leur statut professionnel. Cette attaque systémique vise à réduire la profession au silence et à empêcher les avocat·es de défendre efficacement les principes les plus fondamentaux de la démocratie et des droits de l’homme.
Il existe un besoin critique de réforme et de respect stricte des règles juridiques essentielles garantissant l’indépendance et les activités professionnelles des avocat·es afin de restaurer l’équité et la justice au sein du système juridique du Belarus.
Ce rapport présente le cadre juridique applicable, y compris les instruments internationaux tels que les principes de base des Nations unies relatifs au rôle du barreau et les conventions pertinentes dont la Biélorussie est signataire, ainsi que la législation nationale en vigueur, les conditions d’exercice, les procédures disciplinaires et le fonctionnement des associations d’ avocat·es. En outre, le rapport détaille des cas individuels d’avocat·es qui ont fait l’objet de persécutions de la part de l’État et les façons spécifiques dont ils ont été ciblés.
Enfin, le rapport présente une série de demandes et de recommandations visant à améliorer la situation des avocat·es au Belarus :
- Les avocat·es doivent être libres d’exercer leurs fonctions professionnelles sans intimidation, harcèlement ou interférence.
- Les avocat·es ne doivent pas être associés aux affaires ou aux causes de leurs client·es.
- Les avocat·es doivent avoir le droit de créer et d’adhérer à des associations professionnelles indépendantes et autonomes pour sauvegarder leurs intérêts.
- Toute personne doit avoir le droit d’accédera aux services d’aide et assistances juridiques et aux avocat·es de son choix pour défendre ses droits et les associations professionnelles doivent être habilitées à veiller à ce que toute personne ait un accès égal et effectif à ces services.
- Les procédures disciplinaires à l’encontre des avocat·es doivent être supervisées par des organes impartiaux – qu’il s’agisse de la profession d’avocat·e, d’une autorité indépendante ou d’un tribunal – et sujettes à contestation par l’avocat·e concerné·e devant une cour ou un tribunal indépendant et impartial établi par la loi.
- L’accès à la profession d’avocat·e et la poursuite de son exercice doivent être exempts de toute discrimination fondée sur la race, l’appartenance ethnique, le sexe, la religion, l’opinion politique ou tout autre statut.
- La sécurité des avocat·es qui font l’objet de menaces dans l’exercice de leurs fonctions professionnelles doit être assurée.
- Les avocat·es ne doivent pas subir de répercussions juridiques pour des déclarations faites de bonne foi lorsqu’ils représentent leurs client·es.
- Les avocat·es doivent être libres de s’engager dans des discussions publiques et de rejoindre ou de former des organisations nationales et internationales sans crainte de répercussions.
- Toute personne accusée d’une infraction pénale doit être informée immédiatement des charges qui pèsent sur elle et doit avoir accès à un·e avocat·e.
- Veiller à ce que les avocat·es aient un accès illimité à toutes les informations et à tous les documents pertinents pour une représentation juridique efficace, dans tous les tribunaux et pour toutes les infractions.
- Tous les tribunaux et organes administratifs doivent reconnaître le droit des avocat·es à représenter leurs client·es.
- Tous les avocat·es radié·es du barreau pour des raisons politiques doivent être immédiatement et inconditionnellement réintégré·es, et tous les avocat·es emprisonné·es pour des raisons politiques doivent être immédiatement et inconditionnellement libéré·es.