PUBLIÉ LE 13 mars 2017

Il y a quelques mois notre syndicat, de concert avec l’Association des avocats pénalistes et certains membres éminents de notre profession, s’était publiquement – et légitimement – ému des propos tenus sur les ondes d’une radio nationale par monsieur Hayat, président du tribunal de grande instance de Paris, qui annonçait la création d’une procédure d’urgence en matière d’actes terroristes. A cette occasion, monsieur Hayat faisait savoir, en outre, qu’il avait reçu l’accord des plus hautes instances ordinales de Paris.

La conjonction de ces deux nouvelles avait suscité un très vif courroux des avocats pénalistes, qui n’avaient été ni consultés, ni informés, et ne pouvaient accepter que ce mécanisme s’instaure en violation de précieux principes.

Pour autant, les audiences dites de « circuit court – terrorisme » ont rapidement été inaugurées après une concertation tronquée. La 16ème chambre 2ème section du tribunal de grande instance de Paris se voit donc attribuer le rôle de juger les infractions de consultation habituelle d’un service de communication en ligne faisant l’apologie du terrorisme, d’apologie du terrorisme – « propos structurés par un apologue », avait précisé le président au bâtonnat – et les infractions commises en milieu carcéral « ayant un lien » avec le terrorisme.

Au double prétexte que ce « circuit court » ne se limiterait pas aux comparutions immédiates d’une part, et d’autre part, que certains délits rattachés au terrorisme pouvaient déjà être jugés en comparution immédiate suivant cette procédure depuis la loi du 13 novembre 2014, une partie de la profession semble s’être résignée, et un grand quotidien judiciaire a cru pouvoir observer « un rétropédalage des avocats ».

Le Syndicat des avocats de France dénonce la mise en place de ce nouveau dispositif.

Avec ces « circuits courts » dévolus à une chambre spéciale, s’instaure dans cette matière sensible une nouvelle forme de justice d’exception, dont le mot d’ordre de rapidité masque à peine celui de renforcement de la répression, au mépris du temps de la réflexion et du temps de l’investigation prudente, nécessaires à la Justice pénale dans un Etat de droit.

Sous couvert de décisions touchant à l’organisation d’une juridiction, ce sont les fondements de la politique pénale qui en sont affectés. Le SAF s’inquiète de ce que l’expérience parisienne puisse contaminer toutes les juridictions françaises et déshumanise la justice pénale.

Les exigences de la Justice ne se confondent pas avec celles de la distribution, à l’univers de laquelle est empruntée l’expression « circuit court ».

C’est pourquoi le SAF demande à la Chancellerie qu’elle intervienne, afin de mettre un terme à cette expérimentation  et  œuvre, de manière concertée, avec tous les acteurs de l’institution judiciaire,  à la recherche de moyens permettant des conditions procédurales dignes de nos règles et principes fondamentaux et d’engager une réflexion commune sur le terrorisme.

Une démocratie qui panique et se laisse terroriser se condamne d’elle-même.

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