PUBLIÉ LE 2 novembre 2015

Le recul du Gouvernement sur le budget de l’aide juridictionnelle est le résultat d’une mobilisation unitaire et exemplaire des avocats dans chaque barreau. Les avocats n’ont pas à rougir et peuvent être fiers d’un mouvement d’une ampleur inespérée !

 Dans la plupart des barreaux, les avocats ont décidé de suspendre la grève. Mais le mouvement n’est pas terminé et le Gouvernement doit comprendre que la profession n’admettra pas une seconde fois, après son mépris affiché à l’égard du protocole signé le 18 décembre 2000, qu’il n’honore pas ses engagements.

 Il appartient désormais aux avocats de veiller à la mise en œuvre effective du protocole signé, et pour cela, de ne pas relâcher la pression. Celle-ci prend plusieurs formes :

 Pour le Syndicat des avocats de France, un soutien à la manifestation à Douai le 3 novembre prochain à 10 h devant la Cour d’Appel à l’initiative de la Conférence régionale des bâtonniers de la région Nord Pas-de-Calais.

 Dans tous les barreaux, une grève du zèle doit également s’organiser, démontrant qu’aujourd’hui, la Justice n’a pas les moyens de soutenir une défense absolue et de qualité :

 Chaque prise de parole, chaque audience, chaque intervention, doit être l’occasion pour les avocats de rappeler l’insuffisance du système :

 ·  distribution de tracts aux justiciables, mise en place de permanences gratuites sous forme, comme à Bordeaux, de cabinets éphémères sur les places publiques.

·  échanges de pratiques avec les magistrats et les greffiers.

Au pénal :

·  demande systématique de copie des jugements correctionnels,

·  appel systématique des décisions des Juges des Libertés et de la Détention en matière de droit des étrangers,

·  demande systématique du délai de réflexion en CRPC, à faire noter au plumitif en cas de difficulté,

·  plaidoiries fleuves ou multiplication des avocats intervenant conjointement à la défense d’une même cause.

Au civil :

 ·  dépôt systématique de dossiers d’aide juridictionnelle avec rédaction de conclusions de demande de sursis à statuer sur le fondement de l’article art 43-1 de décret du 19 décembre 91 ;

·  alternativement, inscription du nom de l’avocat sur les dossiers AJ sans acceptation ni signature, suivie, sur présentation du justificatif de demande d’AJ, de demandes de renvoi systématiques.

 En outre, le Syndicat des avocats rappelle qu’après 2 ans de mobilisation, 2 rapports et une concertation, le temps n’est pas à celui des États généraux qui enterreraient encore la discussion mais à la mise en œuvre des propositions déjà longuement débattues.

 La profession, prenant acte du désengagement constant de l’État, a, par défaut, présenté un projet derrière lequel elle est unie, et sur lequel l’État doit s’engager par la mise en œuvre d’un calendrier précis prévoyant:

 ·  l’instauration d’une taxe affectée, perçue sur les mutations et actes soumis à droits d’enregistrement énumérés à l’article 635 du code général des impôts, ainsi que sur les actes soumis à une formalité de dépôt ou de publicité,

·  la création d’un fonds de péréquation dédié à l’accès au droit et à la justice,

·  le développement de la contractualisation permettant de développer des initiatives pour une Justice du XXIème siècle plus proche, plus efficace et plus protectrice de tous les justiciables.

 Enfin, la Justice du XXIème siècle ne se construit pas avec un budget moyenâgeux !

 Les politiques budgétaires menées par les gouvernements successifs n’ont cessé d’asphyxier l’institution, plaçant la France au sein du système judiciaire européen au 37e rang sur 43 pays, derrière l’Azerbaïdjan ou l’Arménie. L’institution judiciaire est dans une situation si critique qu’elle ne peut plus assumer ses missions qu’en exerçant une pression insupportable sur les personnels et en sacrifiant les droits des justiciables.

 La pénurie a considérablement dégradé les conditions de travail des fonctionnaires et des magistrats : juridictions en état de cessation des paiements, locaux vétustes, pénurie de moyens matériels, vacances de postes, informatique obsolète ou inadaptée. Les objectifs chiffrés qui leur sont imposés, l’obsession du rendement et de l’évacuation des stocks, font peser sur les personnels une pression inacceptable qui les contraint à des renoncements quotidiens quant à la qualité de leur travail.

 Dans le même temps, les usagers de la justice – et plus particulièrement les plus modestes et fragiles – voient leurs droits s’éroder : outre le budget de l’aide juridictionnelle notablement insuffisant, mise en place de procédures expéditives pour gérer les stocks de dossiers. Aussi bien au civil qu’au pénal, les garanties de la collégialité et du contradictoire sont affaiblies ; le droit au procès équitable est délaissé.

 Ainsi, le 16 novembre à Créteil, le 20 à Montpellier et successivement dans les principaux TGI de France, seront organisés des tribunaux d’opinion mettant en cause l’Etat pour « non-assistance à justice en danger » dans le cadre desquels chacun – avocats, magistrats, greffiers, personnel de l’administration pénitentiaire, PJJ, et associations de justiciables – pourra s’exprimer.

 Ils seront l’occasion de rappeler à nouveau l’indigence du budget de la justice et de demander des comptes au Gouvernement.

 Unis et déterminés,  nous obtiendrons satisfaction !

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