PUBLIÉ LE 27 novembre 2023

Alors qu’Éric Dupond-Moretti avait promis une grande réforme des décrets Magendie  » car ils sont trop contraignants, notamment pour les avocats « [1] et de  » desserrer les délais de procédures prévus à ces décrets, dont la rigidité pénalise les avocats et les justiciables « [2], un projet de décret portant simplification de la procédure d’appel en matière civile serait soumis au Conseil d’État, ne comportant quasiment aucune avancée concrète.

L’essentiel des modifications vient entériner l’état de la jurisprudence, y compris dans ce qu’elle a de plus restrictive. Il contiendrait même des reculs notamment s’agissant de l’obligation de mentionner dans la déclaration d’appel la demande d’infirmation[3].

Seules avancées notables, l’augmentation des délais de la procédure à bref délai (ex-905 du CPC)[4] et la faculté offerte au juge d’augmenter les délais prévus par les textes.

Aucune modification n’est apportée quant au régime des sanctions alors qu’il aurait été possible, en cas de dépassement des délais, d’adresser des injonctions de conclure en lieu et place des demandes d’observations sur des caducités ou irrecevabilités soulevées d’office[5].

Cette réforme a minima, loin d’être la révolution promise, vient conforter la procédure Magendie, transformant l’appel à représentation obligatoire en un champ d’obstacles sur lesquels de nombreux justiciables se fracassent chaque année, sans amélioration des délais de jugement.

Rien ne serait mis en place pour modifier les sanctions ou créer de nouvelles voies de régularisation pour mettre un terme au jeu de massacre, alors que le dernier rapport rendu en juillet 2019[6], constatait une explosion des caducités et irrecevabilités des déclarations d’appel aboutissant à ce que 14 505 appelants par an (12,5 % des appels, soit 1 justiciable sur 8) perdent leur procès en raison d’une simple question de procédure. Ces chiffres ne prenant pas en compte les intimés privés de la possibilité de se défendre du fait d’irrecevabilité de leurs conclusions et les appelants privés de la possibilité de soutenir leur argumentation[7] pour lesquels il n’existe pas de données statistiques.

Le SAF exhorte les pouvoirs publics à revoir leur copie afin que la procédure d’appel redevienne un outil au service de l’accès au juge et cesse de l’entraver.

 

 

[1]Compte rendu de la commission des lois de l’AN du 10 janvier 2023 https ://www.assemblee-nationale.fr/dyn/16/comptes-rendus/cion_lois/l16cion_lois2223028_compte-rendu.pdf

[2]Conférence de presse du jeudi 5 janvier 2023 citée par A. Dumourier, Eric Dupond-Moretti dévoile son plan d’action pour la justice , Le Monde Du Droit  5 janvier 2023  https ://www.lemondedudroit.fr/institutions/85209-eric-dupond-moretti-devoile-plan-action-justice.html

[3]Contraire à Cass. 2e civ., 25 mai 2023, n° 21-15.842

[4]Délais de signification de la DA passant à 20 j et délai de conclusions passant à 2 mois ;

[5]Des avis sollicitant des observations sur les caducités et irrecevabilités sont déjà générés de manière automatisés en cas de dépassement des délais, donc l’envoi par le greffe d’injonctions de conclure n’aurait pas engendré de charge significative.

[6]Rapport Bilan des réformes de la procédure d’appel en matière civile, commerciale et sociale et perspectives, Juillet 2019

[7]Absence de demande d’infirmation dans le dispositif des écritures, absence de mention de chefs de jugement dans la DA,  .

Partager