PUBLIÉ LE 27 novembre 2024

Le 20 novembre dernier, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi visant à « sécuriser le mécanisme de purge des nullités », c’est-à-dire à fixer les conditions dans lesquelles les parties peuvent soulever des irrégularités de procédure devant les tribunaux répressifs.

Officiellement, il s’agit de modifier la loi et de la mettre en conformité avec  la décision du Conseil constitutionnel du 28 septembre 2023, qui avait déclaré l’article 385 du code de procédure pénale non conforme à la Constitution. En effet, selon le Conseil, cette disposition empêchait les parties de soulever une nullité de procédure devant le tribunal correctionnel lorsqu’elles en n’avaient connaissance qu’après la fin de l’instruction.

En réalité, sous couvert de renforcer cette possibilité, ce qui serait favorable aux droits de la défense, cette proposition de loi vient la limiter davantage, puisqu’elle introduit une exception dans l’hypothèse où cette cause de nullité serait due  à une « manœuvre » de la part du justiciable.

Or, cette notion de « manœuvre » n’est nullement définie par la loi et pourra être interprétée de façon extensive, ce qui viendra vider de sens la réforme envisagée… Cependant n’était-ce pas son véritable objet ?

Le concept de « manœuvre » avait déjà introduit en 2021, mais uniquement pour la matière criminelle (art. 269-1 CPP), à la toute fin du processus législatif, sans aucune consultation publique.

Personne n’est dupe : la généralisation de la notion de « manœuvres » qui seraient imputables à la défense intervient alors que, dans quelques semaines, une autre proposition de loi contre le narcotrafic doit être débattue au Parlement issue des travaux d’une commission d’enquête sénatoriale qui a multiplié les attaques contre les avocat·es.

Ainsi, les avocat·es exerçant en matière pénale sont soupçonné·es de faire obstacle au processus judiciaire à coup de « stratagèmes » et autres « manœuvres dilatoires ». Il s’avère que cette proposition de loi « narcotrafic » contient de nombreuses dispositions qui remettent en cause les droits de la défense, et ainsi, l’équilibre même de notre procédure pénale !

Il est certain que l’utilisation du terme de « manœuvres » vise à alimenter la suspicion infondée selon laquelle la protection des droits de la défense et des libertés fondamentales par les règles de procédure pénale serait en concurrence avec la manifestation de la vérité et l’œuvre de justice.

Le SAF entend rester vigilant face aux attaques envisagées à l’encontre des droits de la défense et se mobilisera pour que cette notion de « manœuvre » vague et confuse ne constitue pas un obstacle à l’exercice de notre mission d’ avocat·e.

Partager