PUBLIÉ LE 10 décembre 2020

Avec trois décrets du 2 décembre 2020 (nos 2020-1510, 2020-1512 et 2020-1521), le gouvernement permet la collecte « des opinions politiques, des convictions philosophiques, religieuses ou une appartenance syndicale », ainsi que « des données de santé révélant une dangerosité particulière ».

Ainsi, des policiers et des gendarmes pourront renseigner et consulter les fichiers Gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique (GIPASP), Enquêtes administratives liées à la sécurité publique (EASP) et Prévention des atteintes à la sécurité publique  (PASP), qui concernent les personnes « dont l’activité individuelle ou collective indique qu’elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique ou à la sûreté de l’Etat. »

Le champ des personnes susceptibles d’être concernées est ainsi très large – surtout dans un contexte où, depuis trois ans, le gouvernement tend à considérer que tout manifestant est un fauteur de trouble en puissance, ce qui légitime dans son discours l’escalade dans la doctrine du maintien de l’ordre, et l’adoption de lois portant atteinte au droit de manifester. Après les mobilisations contre des mesures régressives et répressives (réforme des retraites et proposition de loi « sécurité globale ») et après les Gilets jaunes, ces décrets permettent à l’administration de ficher sans retenue des opposants politiques, leurs opinions et convictions et leurs problèmes de santé « révélant une dangerosité particulière ».

Les procureurs de la République auront également accès aux convictions philosophiques ou religieuses contenues dans ces fichiers. Dès lors qu’ils sont chargés d’engager les poursuites pénales, doit-on en déduire que ces informations pourraient avoir à entrer en ligne de compte dans leur choix d’orientation des affaires ? On se doute bien que, dans l’esprit du gouvernement, ce n’est pas pour que ces magistrats puissent discuter philosophie avec les justiciables, à l’occasion d’une présentation au palais de justice…

On a pu dire, avec la loi renseignement (2015) que c’en était fini de la vie privée en France. Après une police à l’écoute, les décrets du 2 décembre 2020 instituent une police politique, une police de la pensée.

Devant cette nouvelle offensive contre nos libertés, nos organisations saisissent le Conseil d’Etat pour voir annuler ces décrets.

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