Une nouvelle étape est franchie dans ce que Mireille Delmas Marty dénonçait comme la dérive sans fin de l’État de droit.
L’Assemblée nationale examine la proposition de loi de La République en Marche d’introduire des mesures de sûreté à l’encontre des auteurs d’infractions terroristes une fois leur peine exécutée.
Peu important que le condamné ait purgé sa peine, le groupe majoritaire entend imposer à ceux qui présenteraient « une particulière dangerosité caractérisée par une adhésion persistante à une entreprise tendant à troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur et une probabilité très élevée de commettre l’une de ces infractions » des mesures de sûreté et de contrôle, rétroactivement et indéfiniment.
Ces mesures de sûreté supprimeront en réalité le droit de toute personne condamnée du chef de ces infractions et qui a accompli sa peine à retrouver une vie normale.
Outre que l’imprécision d’une telle définition, ouvre le champ à toutes les interprétations et donc à tous les arbitraires, il s’agit désormais de réduire de manière imprescriptible un être humain à un acte, le plus souvent unique dans son parcours de vie, pour en faire un objet de contrôle permanent.
Cette extraordinaire privation de liberté, déconnectée de la commission d’une infraction, revient à renoncer aux principes essentiels de notre système juridique, au nom d’une insatiable recherche de sécurité.
Rien dans ce texte pourtant ne nous protège ; il n’est qu’un aveu d’impuissance, un affichage électoraliste, la manifestation d’une impréparation manifeste.
Les dispositions exorbitantes du code de la sécurité intérieure, dont aucun bilan n’a jamais été réalisé, permettent déjà à l’Etat d’imposer d’extraordinaires mesures de police administrative à l’égard de tous ceux dont le comportement serait jugé potentiellement menaçant : interdiction de déplacement, assignation à résidence, périmètre de protection, fichage systématique…
Le principal facteur de récidive réside dans l’exclusion et la stigmatisation ; ne pas le comprendre est une grave erreur politique. Une société de contrôle qui ne prévient ni n’évite rien néglige l’essentiel : une véritable politique d’intégration et de réinsertion.