PUBLIÉ LE 3 juillet 2015

Les enfants les plus fragilisés n’ont pas besoin de grandes promesses électorales ou de petites promesses de cabinet, ils n’ont pas besoin de tapis rouge, ni même d’ultimatum. Ce que nous leur devons c’est, sans plus tarder, d’inscrire à l’ordre du jour une réforme de la justice pénale attentive à leurs besoins.

Le droit de l’enfance délinquante a subi tant d’assauts qu’il a perdu de vue l’essentiel : son rôle de protection d’une enfance fragilisée par la dégradation continue de ses conditions socio-économiques, déstabilisée par les histoires personnelles et familiales délitées, par la charge émotionnelle de l’adolescence.

A la radicalité d’un droit dévoyé qui nie leur statut d’êtres en construction, à la brutalité d’une justice toujours plus aveuglée par les mirages d’une répression expédiée, nous voulons substituer une justice de l’enfance en danger, de l’enfance à protéger, à éduquer. Nous voulons une réforme de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante.

Parce que l’enfance est faite de transgressions, de tâtonnements et d’échecs, parce que les actes commis ne doivent ni stigmatiser, ni étiqueter le jeune qui en est à l’origine, c’est d’éducation qu’il doit avant tout être question dans les cabinets des juges des enfants.

Replacer l’éducatif au cœur de la justice pénale des mineurs est un impératif. Il faut pour cela cesser de juger dans l’urgence des déferrements, des comparutions à délai rapproché, des présentations immédiates ou devant les tribunaux correctionnels pour mineurs, pour prendre le temps d’expliquer, de comprendre et d’agir avec l’enfant, sa famille, son entourage. Donner du temps au temps.

La loi doit redonner aux mesures éducatives la primeur qu’elles ont perdue, sous les assauts de mesures coercitives toujours plus nombreuses et pourvoyeuses d’enfermement. Des centres éducatifs fermés aux établissements pour mineurs, la banalisation de l’enfermement condamne les enfants et notre avenir : seule la revitalisation des mesures éducatives et des services chargés de les mettre en oeuvre, apportera une réponse adaptée à leurs besoins.

L’illusion de la réponse systématique a contaminé les esprits : nul ne doit se réjouir de ce que 94% des

procédures donnent lieu à une réponse pénale. Loin de démontrer une recrudescence de la délinquance juvénile contestée par toutes les études sérieuses, loin de signer l’efficacité de la justice des mineurs, ce taux nous dit que notre société, nos institutions ont changé leur regard sur les transgressions infantiles. Qu’elles ont abdiqué leur rôle éducatif entre les mains de juges et procureurs.

Une bonne justice de l’enfance délinquante est une justice débarrassée de l’obsession de la rapidité et qui assume sa dimension d’éducation. C’est une justice qui ne substitue pas la réponse pénale à la réponse sociétale. Rendre justice à ces enfants, c’est réformer le droit de l’enfance délinquante, en profondeur et sans attendre !

Partager