PUBLIÉ LE 13 mai 2013

Un ministre, chirurgien de profession, commet un mensonge d’ETAT et nie dans un premier temps détenir un compte bancaire occulte à l’étranger  -un comble pour un ministre du Budget !-, avant de le reconnaître, contraint et forcé, devant l’accumulation des preuves et de démissionner, et le gouvernement décide précipitamment de mettre en place un dispositif censé moraliser la vie publique et prévoyant notamment l’interdiction pour certaines professions d’exercer un mandat parlementaire pour cause de conflit d’intérêt.

Devant la levée de boucliers qui s’en est suivie au sein de la profession d’avocat, visée en priorité et s’estimant discriminée  – alors que l’article L 149 du Code Electoral prévoit déjà un certain nombre de domaines dans lesquels un avocat devenu parlementaire doit s’abstenir d’exercer sa profession -, le projet de loi a été modifié et raboté, du moins en apparence.
Son article 2 prévoit en effet la nouvelle rédaction suivante de l’article L 146.1 du Code Electoral : « L’exercice d’une fonction de conseil est incompatible avec le mandat de député. »

Première erreur : la fonction  de « conseil » n’existe pas. Tout avocat accomplit des missions de conseil, de consultation juridique, de rédaction d’actes, parallèlement à celle d’activité judiciaire, pour conseiller l’opportunité d’une procédure judiciaire à venir, voire de permettre son évitement grâce à la compétence de l’avocat.

Ainsi avocats du juridique et du judiciaire se retrouvent-ils embarqués dans le même bateau.

Et paradoxalement cette incompatibilité nuira à l’avocat exerçant seul ou dans une petite structure, sans l’appui d’associés.

Deuxième erreur : la profession d’avocat, profession réglementée, a mis en place les règles déontologiques lui interdisant d’exercer des activités lorsqu’un conflit d’intérêt existe

La démocratie n’a pas besoin de morale mais de règles de droit, d’un système de pouvoirs et de contre-pouvoirs impliquant un contrôle citoyen.
Il ne faut pas se leurrer : les dérives existent et la porosité est toujours plus grande dans notre société mercantile entre  les intérêts privés et les choix de politiques publiques.

« On n’osa trop approfondir
Du Tigre ni de l’Ours, ni des autres puissances
Les moins pardonnables offenses
Tous les gens querelleurs, jusqu’aux simples mâtins
Au dire de chacun étaient des petits saints. »
Jean De Lafontaine   « les animaux malades de la peste »

La rénovation des pratiques politiques reste l’enjeu : celui qui écrit et adopte la loi doit être au service de l’intérêt général.

Exercer un mandat de député devrait être vécu comme un épisode dans une vie  où l’on choisit de se mettre au service de ses concitoyens pour faire évoluer la société vers plus d’égalité et de justice sociale.

Troisième erreur : Si dans l’absolu il peut paraître logique de considérer que seule l’interdiction totale du cumul d’une profession privée et d’un mandat électif permettrait d’éviter le conflit d’intérêt, un « congé électif » pourrait garantir à l’élu salarié de retrouver son poste une fois son mandat achevé. Mais ce n’est pas possible pour une profession libérale comme celle d’avocat, dont le cabinet et sa clientèle auraient disparu.

Le SAF proteste, en conséquence, contre l’interdiction qui nous est ainsi faite.

Paris, le 13 mai 2013

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