PUBLIÉ LE 29 janvier 2018

Le mouvement des surveillants des établissements pénitentiaires a mis en lumière la dégradation de leurs conditions de travail,  laquelle, n’est que le reflet de celle des prisons vétustes et surpeuplées.

Les prisons françaises, négligées par les gouvernements successifs, sont régulièrement ciblées par les instances internationales.

La surpopulation carcérale, parfois à plus de 200 %, le manque d’hygiène, la présence massive de rats, pour ne prendre que ces exemples, affectent les conditions d’incarcération et ne peuvent qu’entraver tout travail éducatif ou de réinsertion.

C’est sur ce terreau que peuvent se développer les prosélytismes de tous ordres et la marginalisation qui mettent en danger les surveillants, mais aussi à terme, toute notre société.

Si un accord semble avoir été trouvé entre la ministre de la Justice et le syndicat majoritaire du personnel surveillant de la pénitentiaire, le SAF ne peut que regretter  que le mode d’action choisi par les grévistes se soit fait au détriment des détenus et de leurs droits : pendant près de deux semaines,  les détenus ont été livrés à eux-mêmes, privés de leur famille, de leurs avocats, de toute défense lors des conseils de discipline, de douches, de soins ou de promenade.

La réponse ne se trouve certainement pas dans la prise en charge ultra sécuritaire de certains détenus et la modification de l’article 57 de la loi pénitentiaire de 2009. Le retour des fouilles à nu constituent, incontestablement, des traitements inhumains et dégradants, ainsi que l’a déjà jugé la Cour européenne des droits de l’Homme dans son arrêt Frérot contre la France. La mise à l’écart définitive des détenus considérés comme dangereux ou radicalisés par la création d’une étanchéité totale avec les autres détenus, aussi.

Nous, qui défendons au quotidien les personnes en détention, connaissons les conséquences délétères et contreproductives de telles mesures qui transforment la prison en « usine à captivité  », selon l’expression de M. Delarue, ancien contrôleur général des lieux de privation de liberté [1]

Il est illusoire et dangereux de laisser croire que la solution réside dans ce choix sécuritaire, tout comme l’est, la création de nouveaux établissements. Ce n’est pas augmenter le nombre de places d’emprisonnement qui résoudra le problème carcéral, mais bien, comme le font les autres pays européens, travailler à réduire le nombre des détenus.

La problématique est le choix français du tout carcéral. La France bat d’année en année ses records. Le taux de prisonniers, par rapport à la population française, est largement supérieur à celui des pays européens et continue d’augmenter quand il est en baisse ailleurs en Europe !

Cela tient certes à l’insuffisance des alternatives législatives, mais aussi et surtout, au choix des magistrats de privilégier l’incarcération, même avant jugement.

Sans changement « culturel » de la pratique des tribunaux, la situation carcérale en France restera dans l’impasse.

Nous appelons à ce qu’une vaste réflexion sur la place de la prison dans la justice et dans la société, sur les conditions d’incarcération puisse enfin s’ouvrir dans ce pays.

 

 

[1] Francetvinfo 4 juin 2014

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