PUBLIÉ LE 10 juin 2015

Le gouvernement, porté au pouvoir par une majorité de salariés de ce pays, fait de ceux-ci des citoyens de seconde zone, privés du droit à un recours effectif devant les tribunaux et dont le préjudice sera estimé au forfait et au rabais.

 Or, sacrifier le droit du travail au droit à l’emploi est une duperie qui impose de tordre le cou aux idées reçues : non il n’y a pas en France un recours excessif aux procédures judiciaires, les licenciements économiques ne sont globalement pas remis en cause, et il n’y a pas d’explosion du contentieux prud’homal.

 Le raisonnement articulé est mensonger : le poids des condamnations prud’homales ne fait pas chavirer les entreprises !

 Ce projet foule aux pieds les principes qui fondent notre République et notamment les principes d’égalité et de réparation intégrale du préjudice reconnus par la convention 158 de l’OIT, la Convention Européenne des Droits de l’Homme, le droit de l’Union européenne et le code civil dont l’application rappelle que le juge n’est pas là pour appliquer un barème.

 Limiter la réparation du préjudice, c’est offrir sans aucune contrepartie à tout employeur le droit de s’affranchir des textes en empêchant le juge de s’en mêler et de rappeler le principe selon lequel celui qui cause un dommage par sa faute s’oblige à le réparer entièrement.

 Le salarié modeste devra désormais seul assumer les conséquences du risque économique sans considération de sa situation, son âge, ses qualifications, ses chances de retrouver un emploi et des dégâts du licenciement sur sa santé et sur sa vie personnelle et familiale. En modulant le niveau d’indemnisation selon la taille de l’entreprise, la proposition du Gouvernement instaurera en outre une inégalité entre les salariés selon l’endroit où ils ont travaillé.

 N’oublions pas qu’il ne s’agit pas de l’indemnité due pour tout licenciement mais de la sanction des licenciements illégaux, abusifs. Ce plafonnement vise donc en réalité à savoir à l’avance ce que coûtera un licenciement injustifié, quitte à le provisionner ou à assurer ce risque, et à dégrader dès l’origine la relation de travail par la pression de cette perspective…

 En réalité, ces dispositions visent à faire des salariés de simples variables économiques de la compétitivité de l’entreprise, considérés comme un risque dans une logique prudentielle propre au monde de l’assurance. Bienvenue dans un monde de violation programmée des règles du droit du licenciement fondé sur la promesse paradoxale et mensongère que moins sanctionner les licenciements abusifs créera de l’emploi !

 Nous appelions de nos vœux une amélioration de la justice sociale, nous assistons à son enterrement par une alliance malfaisante entre un ministre de l’économie et le MEDEF dictant sa loi.

 Les parlementaires devront prendre leurs responsabilités et rejeter ces dispositions.

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