PUBLIÉ LE 19 juillet 2016

La France, condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme dans l’arrêt POPOV du 19 janvier 2012, a une nouvelle fois été condamnée par la Cour à 5 reprises le 12 juillet 2016 pour avoir privé de libertés des enfants dans des conditions caractérisant un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales.

La Cour juge qu’au-delà d’une brève période, la répétition et l’accumulation de ces agressions psychiques et émotionnelles ont nécessairement des conséquences néfastes sur un enfant en bas âge et constituent, compte tenu de leur degré de gravité, un traitement inhumain et dégradant au sens des dispositions de l’article 3 de la Convention.

Si le SAF et l’ADDE regrettent que la Cour n’ait pas condamné le principe même de la privation de liberté des enfants en vue de leur éloignement, elle a néanmoins constaté que le régime carcéral impropre à leur bien-être, à leur développement et à leur santé emporte des conséquences gravissimes pour eux.

Malgré les engagements de l’Etat français, les circulaires et les modifications législatives intervenues depuis l’arrêt POPOV et notamment la loi du 7 mars 2016 qui « légalise » la privation de liberté des enfants, il est aujourd’hui évident que le cadre légal de la rétention en France n’est nullement un rempart contre de futures condamnations par la Cour Européenne.

En effet, deux des cinq requêtes soumises à l’appréciation de la Cour concernent des faits postérieurs à la circulaire Valls du 12 juillet 2012 relative à la privation de liberté des enfants dont les dispositions ont été reprises par la loi du 7 mars 2016.

La Loi française ne fixe aucune limite légale au temps de privation de liberté d’un enfant, ni procédure lui permettant de faire valoir ses droits contre cette privation de liberté, la Cour Européenne estimant hélas que l’appréciation par le Juge national de la légalité de la mesure de privation de liberté à l’aune de l’intérêt supérieur de l’enfant suffit à se passer d’un cadre législatif.

Or, la loi est le seul moyen de garantir concrètement l’intérêt supérieur de l’enfant face aux mesures privatives de liberté et d’obliger l’Etat ainsi que les juges à évaluer la situation de chacun de ces enfants et à prévenir la répétition des rétentions abusives.

L’absence de réaction du gouvernement français à ces 5 condamnations par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, qui relève qu’en France des enfants sont soumis par l’Etat à des traitements inhumains et dégradants, est particulièrement inquiétante.

Force est de constater que les promesses de campagne du président Hollande ont été cruellement reniées par un gouvernement qui se félicite des milliers de mesures d’éloignement qu’il prononce chaque année.

L’Etat a perdu le sens de l’intérêt général et n’a que faire d’enfants qui n’ont, dans le droit national, aucun moyen de se défendre face à l’enfermement. Ces enfants ne doivent plus être regardés comme s’ils n’étaient que les bagages de leurs parents.

Nous continuerons donc d’être vigilants et de combattre l’enfermement des enfants au nom de lois injustes et profondément maltraitantes, dictées par des choix politiques purement électoralistes pour tenter de rassurer un électorat abreuvé d’un discours xénophobe.

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